Accueil Culture Mes odyssées en Méditerranée: Mélita, journal maltais d’information

Mes odyssées en Méditerranée: Mélita, journal maltais d’information

L’histoire de la presse tunisienne, montrée erronément comme «étrangère», constitue un chapitre très intéressant de l’histoire du pays tout court et mériterait d’être analysée, débattue, voire utilisée dans les programmes scolaires.

Le premier journal, qui paraît en Tunisie le 21 mars 1838, est un journal en langue italienne ayant pour titre «Il Giornale di Tunisi e Cartagine», Le journal de Tunis et Carthage, de Romeo et Malatesta, deux imprimeurs napolitains. Ce journal, interdit dès son premier numéro par le Bey de Tunis, marquera le début de la presse tunisienne et il sera considéré aussi comme le précurseur des 130 journaux italiens apparus en Tunisie de 1838 jusqu’à la fin du protectorat français.

Si la collectivité italienne était assez nombreuse et représentait environ 10% de la population locale de l’époque, la collectivité maltaise était numériquement la deuxième «communauté étrangère» en Tunisie. Une population historique, très bien intégrée, qui a su se mélanger au cours des décennies avec nos co-nationaux, très proche aussi du Tunisien et du Sicilien avec lesquels elle partageait souvent la misère et la discrimination de la part des autorités coloniales.

Cette communauté laborieuse, avec une forte identité, qui a toujours gardé les liens avec la mère patrie, avait donné naissance en Tunisie à des journaux en langue maltaise et ou française, expression vivante de la communauté.

Le premier journal en langue maltaise, paru en Tunisie en 1884, est «L’Ape maltese», l’Abeille maltaise, suivra, en octobre 1906, «L’Echo du Centre» de courte durée et disparu après quelques parutions.

Le journal maltais qui a retenu mon attention est «Mélita», bimensuel, bilingue, édité par la communauté maltaise de Sousse et imprimé par Victor Fenech, gérant de l’Imprimerie Française de Sousse.

L’un des rares journaux à ma connaissance à être édité en deux langues, maltais et français, qui fera sa parution le 5 janvier 1937. En effet le nom «Mélita» est l’ancienne appellation de Malte, un journal assez patriotique, apolitique et fort défenseur de l’identité maltaise en Tunisie :

«Aucune politique ni critique étrangère ne trouveront place dans ses colonnes et seuls les intérêts du peuple maltais guideront ses gestes… il sera sans défaillance le défenseur vigilant de vos droits et saura vous rappeler vos devoirs, si besoin est».

Dans ses pages on pouvait aussi lire des poèmes en langue maltaise qui parlaient de l’amour de la collectivité vers le pays natal :

«Viva Malta»

Poezija maltija

Viva Malta fiwr tad-dinja

Gawhra tal Méditeran

L’ilsna ta uliedek kolna

Viva Malta ikantaw

Ce qui est frappant par rapport à la collectivité italienne de Tunisie, c’est ce désir pour les Maltais de vouloir faire retour un jour dans leur patrie d’origine et de se considérer toujours comme des invités dans le pays nord-africain, alors que les Italiens élurent leur domicile en Tunisie.

D’ailleurs, cette envie de retour au pays, on peut la lire sur les pages du journal «Mélita», une sorte de désir jamais éteint de retour aux sources, «même si la Patrie ne doit pas être considérée comme un mythe, ni comme une idole que l’on vénère, ça restera toujours notre chère Patrie». Le journal affirme aussi «qu’en terre étrangère il se fait un devoir de se comporter parfaitement, en respectant, sans en abuser, les lois de l’hospitalité qui lui sont offertes, se considérant toujours comme étranger, et en freinant son ardeur patriotique, il excelle dans l’art d’être modeste et de passer inaperçu… Car dans notre cœur rayonne plus que jamais l’amour sacré de notre belle et chère petite Patrie».

«Mélita» se voudra donc comme le journal par excellence, écrit pour tous et par tous, il servira de trait d’union nécessaire entre la communauté maltaise de Tunisie mais aussi un pont entre La Valletta et Tunis, exhortant les lecteurs à une «Fraternité Maltaise» internationale, pour toutes les communautés maltaises présentes dans le monde, fraternité indispensable pour renforcer le sentiment d’appartenance à la Patrie, et ce, même pour les générations à venir qui restent «Maltais avant tout» dans leur âme, leur langue et dans leur identité culturelle.

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